Reconstitution (non-officielle) des faits de la crise tibétaine :
Le 10 mars, les moines tibétains sortent des monastères pour souligner le 49e anniversaire du soulèvement raté de 1959. Il y a répression, certains sont malmenés, on ne connaît pas trop les détails. Dans les jours qui suivent, il y a effet d’entraînement. Le 14 mars à Lhassa, alors que les autorités devraient avoir une forte présence en raison des manifestations pour l’indépandance et le retour du Dalai-lama, elles sont peu visibles tandis que des actes de destruction ont lieu. On laisse faire les émeutiers, qu’ils soient « vrais », agents provocateurs ou mélange des deux. Les autorités prennent photos et vidéos, préparant la riposte avec leur arme de choix : la propagande.
Après quelques heures de chaos, la ville est vite bouclée par l’armée, l’imposition de la loi martiale est officieuse. Tous les journalistes sont expulsés. Les informations qui nous proviendront par la suite seront essentiellement des témoignages.
Le silence est finalement rompu par les autorités : il y a en effet des morts, mais ce ne sont pas des moines et vraisemblablement pas des Tibétains. Ce sont seulement des victimes des émeutiers, ayant péri dans les flammes des incendies ou par lynchage. Ce sont ces nouvelles uniquement qui seront diffusées en Chine continentale par les appareils médiatiques tous fermement censurés ou autocensurés. Puis commencent les attaques verbales contre le Dalaï-lama, l’accusant d’avoir fomenté la violence et d’être un terroriste. Ou encore pire, d’être le « diable ». « Il veut saboter les Jeux olympiques [JO] », dénoncent le Parti communiste. Le Dalaï-lama réplique calmement : « Je suis pour les JO en Chine. » Et le vieux moine a toujours défendu la non-violence.
Les positions du chef spirituel tibétain font maintenant encore moins l’unanimité au sein du mouvement tibétain : des franges plus radicales jugent ses prises de position beaucoup trop molles. Mais cette division, causée par la violence, joue complètement le jeu du régime chinois. Plus il stimule la violence – dont il sait qu’il pourra toujours contrôler et utiliser pour contre-attaquer – plus les Tibétains se divisent et plus la population chinoise majoritaire de l’ethnie han cultivera une haine envers les Tibétains.
Il faut comprendre que la population chinoise est fortement embrigadée. Le contrôle idéologique – par le billet de l’éducation, des médias, de l’art, de la force et de la peur – fait que fondamentalement, une majorité de Chinois n’est plus en mesure de distinguer le pays du régime. Ainsi, toute critique du régime est vécue comme une attaque personnelle. Toute revendication d’indépendance des minorités est un affront à la « mère patrie ».
Le Parti communiste chinois est passé maître dans l’art de mettre en opposition différents groupes. À travers les multiples campagnes politiques qui ont entaché son histoire, il a même réussi à faire qu’au sein d’une même famille un fils dénonce un père, un père torture un fils, au nom du communisme et de la révolution. Telle était une des tristes histoires de la Révolution culturelle. Le meurtre a toujours été encouragé lorsqu’il fallait éradiquer une classe « ennemie ». La torture devient la norme lorsqu’il faut « rééduquer » les pratiquants de la discipline spirituelle Falun Gong, les Tibétains, les Ouighours musulmans ou les chrétiens des églises clandestines.
C’est dans un tel contexte qu’il faut comprendre la crise actuelle. Beaucoup d’analystes ont affirmé qu’il était étrange que le régime chinois réagisse ainsi alors que les Jeux approchent. La vérité est qu’il n’a d’autre option. Il s’agit d’un régime érigé et maintenu par la force brute et la tromperie. Et son orgueil est tel qu’il se soucie peu du regard des étrangers, envers qui les vieilles rancunes ne sont pas entièrement consumées. Il sait qu’au bout du compte, peu importe combien il tue, le Comité international olympique le soutiendra, puis les gouvernements du monde continueront d’être soumis à son poids économique. Encore pire, certains gouvernements sont prisonniers de sa logique politique.
Ce qu’il nous reste? Les mots qui font réfléchir et poussent dans l’action. Boycott des produits chinois (un défi de taille) et boycott des produits des commanditaires des Jeux (bonne chance encore, en voici la liste : Coca-Cola, General Electric, Johnson & Johnson, Kodak, Lenovo, Volkswagen, Manulife, McDonald’s, Adidas, Omega, Panasonic, Samsung, Visa, UPS, Budweiser, Bureau en gros) .
Ce n’est pas lseulement le Tibet qui rend ces Jeux abérrants. Ce sont près de 60 années de règne dictatorial ayant coûté la vie à environ 80 millions de Chinois.
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